Paris le 18 janvier 2023,
Vers la fin de l’ère des manipulations des écoutes en ligne
Cette année aux Victoires de la musique, l’artiste le plus streamé sera-t-il le plus gros tricheur ?
Début 2021 nous attendions du Centre National de la Musique de mettre en place une régulation du streaming pour qu’il ne perpétue pas les biais et pratiques douteuses du passé de notre industrie.
Un an plus tard, nous accueillons avec intérêt les résultats de son étude sur la manipulation des écoutes en ligne.
Malgré des résultats partiels (on peut déplorer l’absence de participation des gros acteurs comme Apple Music, Amazon Music et Youtube) cette étude met en lumière la partie visible de l’iceberg que peut représenter la fraude :
- Sur le panel représenté par Deezer, Qobuz et Spotify, la détection en France est observée entre 1% et 3% en 2021, ce qui au regard du marché représente entre 1 et 3 milliards de streams détectés comme étant Frauduleux.
Il nous semble indispensable de lire entre les lignes : si les chiffres paraissent faibles en première lecture par rapport au 7% qui circulent dans les médias, il faut noter que la fraude est très difficilement identifiable (toutes les formes ne le sont pas) et les méthodes de détection en constante évolution.
- Sur Deezer et Spotify, la fraude se situe à plus de 80% au niveau de la longue traine (en dessous du top 10000).
Il semble aussi que les streams frauduleux faciles d’accès et faciles à identifier par les DSP émergent dans une ‘longue traine’ que constituent les références les ‘moins populaires’. A contrario il est très probable que les artistes du top 10000 puissent avoir recours à des services plus élaborés et moins facilement identifiables.
- Par ailleurs, l’étude rappelle à juste titre qu’une forte augmentation du nombre de streams enregistrés sur une plateforme, sans augmentation proportionnelle du nombre d’abonnés payants, entraîne mécaniquement une baisse de la valeur unitaire d’un stream et donc de la rémunération des ayants droit.
Celle-ci tend à prouver que comme dans le dopage, la détection de la fraude dépend de la qualité du procédé utilisé et en miroir de la capacité de dépistage adaptée. Afin de limiter les effets financiers de cette triche sur l’intégralité des catalogues, nous appelons à la réouverture urgente des échanges sur le modèle de rémunération User Centric qui pourrait se présenter comme un garde-fou sur cet aspect.
De surcroit les fake streams, bien au-delà de leur incidence sur la seule économie phonographique, viennent aussi porter préjudice au secteur des concerts et des festivals puisqu’ils biaisent la notoriété réelle de l’artiste. C’est ainsi toute une filière qui en pâtit.
L’inquiétude demeure, l’urgence d’un modèle de rémunération du streaming plus vertueux reste au sommet de nos préoccupations. Nous remercions le Centre National de la Musique pour la tenue de cette étude, inédite au niveau mondial. Nous espérons maintenant que l’ensemble de la filière applique ses recommandations rapidement, tant au niveau de la détection que des sanctions efficaces qui auront un véritable impact sur la fraude.