Dans un contexte de réduction des financements publics et de fragilité des ressources propres (ventes, billetterie, droits…), de plus en plus d’acteurs culturels se tournent vers le mécénat pour diversifier leurs sources de financement. Longtemps considéré comme réservé aux grandes institutions, le mécénat s’étend désormais à toutes types de structures à condition. Il peut représenter une source de financement complémentaire, à condition de vérifier en amont votre éligibilité juridique et fiscale.
• 7,5 milliards d’euros : c’est le montant estimé du mécénat en France en 2023 (L’Observatoire Philanthropie et Société).
• Le montant de soutien global des entreprises aux structures d’intérêt général s’établit à 3,8 milliards d’euros (Admical) et le Baromètre de la générosité 2023 indique que les dons déclarés des particuliers se sont élevés environ à 3,63 milliards d’euros (IR + IFI)
• 28% des entreprises mécènes agissent dans le domaine culturel
• 36 % des projets de mécénat culturel intègrent une dimension dite de « mécénat croisé » en s’alliant principalement à des enjeux de formation, d’insertion professionnelle, de solidarité ou d’environnement.
• 88% des entreprises mécènes agissent au niveau local ou régional
• Aider à l’identification d’éligibilité au mécénat
• Fournir des repères concrets et pratiques pour initier une démarche mécénat
• Clarifier les principales références juridiques et fiscales applicables
Définition du mécénat : (réf. Arrêté du 6 janvier 1989)
« Le mécénat est le soutien matériel apporté, sans contrepartie directe, à une œuvre ou à une personne physique ou morale pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général. »
Trois notions clés à retenir :
• Soutien (financier, en nature ou en compétence)
• Absence de contrepartie directe
• Intérêt général
Références : articles 200 CGI (dons des particuliers) et 238 bis CGI (dons des entreprises)
• Association loi 1901 à but non lucratif agissant dans un champ d’intérêt général (dont culturel)
• Fondation reconnue d’utilité publique
• Fonds de dotation
• Organisme culturel public ou privé à gestion désintéressée, présentant des œuvres au public
• Établissement d’enseignement artistique public ou privé à but non lucratif
• Entreprise d’insertion, chantier d’insertion, ou structure équivalente
✅ Les membres de la FÉLIN qui sont constitués en association (environ 30 % des membres) peuvent être éligibles au mécénat.
Pour cela, quatre conditions cumulatives doivent être réunies :
1. Activité entrant dans le champ du mécénat :
Exercer une activité dans l’un des domaines précisés dans les articles 200 et 238 bis du CGI, à savoir : « avoir un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l’achat d’objets ou d’œuvres d’art destinés à rejoindre les collections d’un musée de France accessibles au public, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises. »
✅ Cohérent avec l’activité des membres de la FÉLIN (domaine culturel)
2. Absence de cercle restreint de bénéficiaires
Les actions doivent bénéficier à un public large et non à des membres ou ayants droit uniquement.
✅ Cohérent avec l’activité des membres de la FÉLIN
3. Gestion désintéressée
Aucun bénéfice distribué ; la gouvernance est assurée bénévolement (sauf exception encadrée)
✅ Cohérent avec l’activité des membres de la FÉLIN
4. Activité non lucrative (ou accessoirement lucrative sous conditions)
C’est le point le plus délicat pour les labels : s’ils exercent une activité économique principale, cela peut remettre en cause leur éligibilité. Il faut donc exercer une activité non lucrative et non concurrentielle (rappel : les associations sont par nature des organismes à but non lucratif, mais qui peuvent avoir des activités lucratives)
❌ Il s’agit donc d’un critère à vérifier
L’administration fiscale distingue activité lucrative et non lucrative selon des critères appelés « règle des 4 P » (quatre critères cumulatifs).
En cas de doute, l’activité peut être considérée comme lucrative, rendant la structure inéligible au mécénat fiscal.
Critère | Description |
Produit | L’activité́ de l’organisme doit tendre à satisfaire des besoins pas du tout ou insuffisamment couverts par le marché. |
Public | L’activité doit bénéficier principalement à des personnes justifiant l’octroi d’avantages particuliers au regard de leur situation économiques et sociale. Les excédents éventuellement réalisés, voire temporairement accumulés, doivent être destinés à faire face à des besoins ultérieurs ou à des projets entrant dans le champ de l’objet non lucratif de l’organisme |
Prix | Plus les prix pratiqués s’éloignent de ceux du secteur marchand, plus la présomption de non-lucrativité́ est forte. |
Publicité | D’éventuelles opérations de communication de l’organisme doivent, au travers du contenu des messages diffusés et du support utilisé, tenir compte du public visé |
1. La franchise de 80 000 € (CGI, article 206 bis)
Les recettes commerciales accessoires n’excédant pas ce seuil ne remettent pas en cause la non-lucrativité
2. L’exception « spectacle vivant ou arts visuels » (article 238 bis f du CGI)
Elle ne s’applique qu’aux structures dont l’activité principale est la présentation d’œuvres au public.
➤ Peu d’adhérents de la FÉLIN peuvent y prétendre.
3. Le rescrit fiscal (article L.80 C du LPF)
➤ Recommandé : permet d’obtenir une réponse formelle de l’administration sur l’éligibilité de la structure. Délai moyen de réponse : 3 à 6 mois. À adresser à la DGFIP du département. Vous trouverez un exemple dans votre espace adhérent.e.
Une fois votre éligibilité confirmée, le mécénat doit s’envisager comme une démarche stratégique articulée en trois étapes :
1. Diagnostic de votre structure
2. Construction de votre offre mécénat
3. Encadrement juridique et organisationnel
Mais d’abord, il est essentiel de bien comprendre les différentes formes de mécénat et leur distinction avec le parrainage (sponsoring)
Le mécénat peut s’exprimer sous trois formes principales, toutes éligibles aux avantages fiscaux dès lors que les conditions sont réunies :
1)Le mécénat financier (93% des entreprises mécènes)
Il s’agit du don d’une somme d’argent, versée directement par une entreprise ou un particulier au bénéfice de votre structure.
Exemple : une entreprise soutient un projet de résidence ou de création en apportant 3 000 €.
2) Le mécénat en nature (28% des entreprises mécènes)
Il consiste à mettre à disposition ou à offrir des biens ou des équipements, ou à faire un don de service. Cela peut prendre la forme :
• d’un don mobilier ou immobilier (ex. : instruments, matériel de production, décors, etc.)
• d’un prêt de matériel ou de locaux
• d’un accès gratuit à une technologie ou un outil de production
• d’un don de marchandises ou de stocks
• de la réalisation d’une prestation
Exemples : Mise à disposition d’un studio d’enregistrement, don de pots de peinture pour la rénovation des locaux
à noter : La valorisation du don est à la charge exclusive du mécène (l’entreprise donatrice), le bénéficiaire n’a pas à justifier la valeur estimée.
3) Le mécénat de compétences (16% des entreprises mécènes)
Il s’agit d’un prêt de main d’œuvre ou de prestations de service effectuées gratuitement par une entreprise, dans son domaine d’expertise.
Exemples : Réalisation gratuite d’un site internet, conseil juridique ou comptable offert à une structure culturelle, prise en charge d’une campagne de communication
-À noter : le mécénat de compétences implique une mise à disposition de salariés sur leur temps de travail.
-À noter : le bénévolat, en revanche, ne donne lieu à aucun avantage fiscal. Depuis juin 2022, il est défini par le CESE comme une action non rémunérée, menée librement et sur temps personnel, hors du cadre du mécénat.
Il est fondamental de distinguer mécénat et parrainage car les implications fiscales et juridiques diffèrent, tout comme l’intention et les contreparties attendues.
1) Définition du parrainage
Le parrainage (ou sponsoring) est un soutien apporté dans une logique commerciale, en vue d’en retirer un bénéfice pour l’entreprise (image, notoriété, visibilité, etc.).
Il s’agit d’une dépense de communication (branding), qui donne lieu à facturation et est déductible en tant que charge d’exploitation (article 39-1 7° du CGI).
2) Mécénat versus Parrainage : tableau comparatif
Critères | Mécénat | Parrainage |
|---|---|---|
| Finalité | Soutien à une activité d’intérêt général | Recherche de bénéfices directs pour l’entreprise |
| Champs d’intervention | Culture, solidarité, environnement, éducation, patrimoine… | Événementiel, sport, musique, communication, audiovisuel… |
| Formes possibles | Financier, en nature, en compétences | Financier, en nature, en services |
| Intention du donateur | Geste désintéressé (sans retour direct) | Investissement marketing avec attente de visibilité |
| Contreparties | Symboliques, non valorisables juridiquement | Mesurables, proportionnées (logo, places offertes, mentions, etc.) |
| Cadre juridique | Convention de mécénat | Contrat ou convention de parrainage |
| Traitement fiscal | Réduction d’impôt (art. 200 ou 238 bis CGI) | Charge d’exploitation (article 39 CGI) |
| Justificatif fourni | Reçu fiscal | Facture ou contrat précisant les contreparties |
| Temporalité | Approche durable, dans une logique d’engagement | Action ponctuelle, ciblée ou événementielle |
Il est possible de proposer les deux options à une entreprise, à condition de clarifier l’intention et les retours attendus. L’un n’empêche pas l’autre : une même structure peut bénéficier de mécénat et de parrainage, sur des projets ou supports différents.
1) Évaluer son modèle économique
Décrypter la répartition actuelle entre financements publics, recettes propres, partenariats privés, mécénat ou sponsoring.
2) Identifier ses besoins
Définir les priorités court/moyen/long terme :
• besoins financiers,
• en nature (matériel, espaces, biens),
• ou en compétences (juridique, communication…).
à noter : distinguer les besoins de fonctionnement de ceux liés à des projets spécifiques.
3) Clarifier ses engagements
Un projet artistique/culturel affirmé doit s’accompagner d’un positionnement sociétal (jeunesse, inclusion, environnement, éducation, etc.). Ces engagements sont souvent déterminants pour les mécènes.
4) S’assurer de la mobilisation interne
Qui portera la démarche mécénat ? Même si un référent est désigné, l’ensemble de l’équipe (ou du CA) doit être sensibilisé à cette dynamique
1) Formaliser les valeurs et les engagements
Rédiger une charte du mécénat inspirée, par exemple, de celle du ministère de la Culture, pour poser un cadre éthique et transparent (exemple dans l’espace adhérent.e)
2) Définir un ou plusieurs formats de soutien
Clubs, cercles, comité de soutien… chaque modèle peut refléter l’identité du projet et la nature de ses soutiens.
3) Cibler les mécènes potentiels
Analyser :
• leur profil (TPE/PME/ETI, grands groupes, particuliers),
• leur ancrage territorial,
• leur lien potentiel avec votre structure (adhérents, public, anciens soutiens,partenaires…).
Cela permettra notamment de construire des paliers de soutien adaptés.
4) Penser les contreparties avec rigueur
Même si le mécénat repose sur un geste désintéressé, des remerciements sont possibles, dans les limites fixées par la réglementation fiscale (voir ci-dessous).
5)Soigner sa communication
• Créer un dossier de présentation professionnel (argumentaire clair, visuels, budget, impacts).
• Prévoir une stratégie d’approche personnalisée (événement de lancement, campagne ciblée, activation réseau).
• Intégrer différents canaux de collecte : micro-dons, dons par SMS, dons récurrents, QR codes, etc.
1) Outillage administratif
Pour encadrer et sécuriser votre démarche mécénat, il est indispensable de vous doter d’outils adaptés :
• Une convention de mécénat claire et conforme (cf. modèle du ministère de la Culture, dans votre espace adhérent.e)
• Des tableaux de suivi des dons et des mécènes (Excel, CRM, etc.)
• Un reçu fiscal délivré pour chaque don, selon les modèles Cerfa en vigueur
o Particuliers : Cerfa n°11580*05 (formulaire n°2041-RD dans votre espace adhérent.e)
o Entreprises : idem, en précisant bien le cadre fiscal (art. 238 bis CGI dans votre espace adhérent.e)
A noter : Depuis la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, tout organisme qui délivre des reçus fiscaux doit effectuer une déclaration annuelle à l’administration fiscale (article 222 bis du CGI), précisant :
• le nombre de reçus émis,
• le montant total des dons correspondants.
Cette déclaration doit être faite dans les 3 mois suivant la clôture de l’exercice. Si aucun reçu n’a été émis, aucune déclaration n’est requise.
Cette déclaration ne contient aucune information sur l’identité des donateurs.
Les entreprises, comme les particuliers, doivent impérativement disposer d’un reçu fiscal pour bénéficier de la réduction d’impôt.
2)Veille sectorielle et ressources utiles
Rester informé est essentiel pour sécuriser et renforcer la démarche :
Exemples de structures et outils utiles
– Philanthro-Lab (Paris) Les Jeudis du mécénat (Ministère de la Culture)
-Les chemins du mécénat (DRAC / Régions)
-Admical, Carenews, France Générosités
-Association Française des Fundraisers (mentorat, formations)
-Référents mécénat des DGFIP départementales
Le principe fondamental du mécénat est la gratuité du don. Néanmoins, des contreparties limitées et encadrées sont admises par l’administration fiscale.
1) Pour les particuliers
• Contreparties tolérées à hauteur de 25 % de la valeur du don, avec un plafond absolu de 73 €
• Exemples : carte de membre, affiche, remerciement symbolique
A noter : dîner de gala : attention, s’il y a un prix d’entrée, il s’agit d’une vente, pas d’un don
(sauf si une part du tarif reste clairement identifiable comme don).
2) Pour les entreprises
• Le don ne doit jamais être conditionné à une contrepartie
• Les contreparties (matérielles ou immatérielles) doivent rester accessoires et sans rapport commercial direct.
• En pratique, on applique une tolérance de 25 % maximum du montant du don
• Les contreparties doivent être prévues et valorisées dans la convention
Exemples admissibles de remerciements entreprise :
• Logo sur les supports (site, affiche, invitation)
• Invitations pour les clients ou salariés
• Visites privées, événements dédiés
• Communication sur l’impact du mécénat
Type de contrepartie | Méthode de valorisation |
|---|---|
Matérielles (ex. objets, places offertes) | • Si bien vendu par l’organisme : prix public Sinon : coût de revient |
Communication (logo, nom) | Valorisation en fonction du rayonnement : ➤ 0 % si local ➤ 5 % si régional ➤ 10 % si national/international (taux indicatifs, estimation possible à 1-2 %) |
Autres immatérielles (ex. rencontre avec un chercheur) | Calcul sur le coût de revient réel : salaire, déplacement, temps mobilisé |
Le mécénat constitue un levier précieux pour les membres de la FÉLIN désireux de diversifier leurs ressources et de consolider leur ancrage artistique, culturel et sociétal.
Pour en bénéficier pleinement, il est impératif de :
• vérifier son éligibilité fiscale, en particulier la non-lucrativité de l’activité principale
• poser une stratégie solide, articulée autour d’un diagnostic clair, d’une offre mécénat bien ciblée, et d’un cadre juridique rigoureux
• encadrer la relation mécène, en respectant les règles de transparence, de contreparties et de valorisation
En cas d’incertitude, le rescrit mécénat reste l’outil de sécurisation le plus adapté : cette procédure gratuite permet d’obtenir une réponse officielle de l’administration sur votre capacité à recevoir des dons donnant droit à avantage fiscal.
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